Article Connaissance des Arts
Septembre 2021
« Julie Decubber réinvente le bijou-récit, alliant avec brio et repect de l’âme des matériaux. A découvrir à Paris, au musée des Arts décoratifs.
Les nouveaux bijoux de Julie Decubber
C’est un long voyage qui a tout déclenché. Cette jeune femme du nord de la France quitte Bruxelles après des études en communication sociale pour arpenter les marchés de Bolivie et du Pérou. Elle y découvre un artisanat féminin de la parure réalisé avec ce que l’on trouve sur place, de la terre et des fibres végétales. Le déclic se fait dans un village d’Amazonie équatorienne, lorsqu’elle réalise que l’on peut sacraliser la matière la plus simple en fabricant un objet aussi beau que porteur de sens social. Julie Decubber a trouvé sa vocation : elle fera des bijoux. Elle part au Maroc apprendre la technique de l’argent dans un atelier berbère. Pas besoin d’école, elle veut apprendre sur le tas, s’imprégner de l’esprit du lieu, de l’histoire du matériau. Elle refuse le concept de la pierre précieuse, se veut écologique. Admiratrice de Gilles Jonemann, grand précurseur du bijou contemporain, elle attend son heure et finit par pouvoir se former auprès de lui pendant trois ans. Elle apprend la rigueur technique, l’utilisation de matières dures comme les bris de vaisselle, et trouve sa propre expression dans ces éclats colorés et décorés qu’elle rabote, assemble, combine. L’objet est le résultat non d’un ajout de matériau mais d’un retrait. En découle l’idée de saisir ce qui se cache sous le visible, et de se nourrir de tout son bagage d’images-souvenirs. Dans ce travail de remémoration par la transformation, elle fait raconter à ses bijoux autre chose que ce qu’ils semblent montrer. Elle vient de ressusciter, en les recyclant, les ratés et les tessons de quinze femmes céramistes, tout en conservant l’âme et le style de chacune. La terre l’intéressant toujours plus, elle envisage de travailler sur le vécu de la belle brique rouge du pays de ses origines. »
ELISABETH VEDRENNE